Call me maybe [Rain]

Dans l’obscurité quais totale de la forêt, je trottine. Je connais le chemin par cœur. J’évite souplement chaque obstacle, ne faisant aucun bruit. Une véritable ombre. La nuit es bien avancée déjà. Je dois me dépêcher. Je me sais près du clan des Bois Hantés. Même s’ils me connaissent car j’arpente leur terres, ils n’hésiteront pas a me chasser... Une fois de plus. Mais le dominant le sait déjà, je reviendrais. Toujours. Car n’est pas ici que je suis née ? Si. Et chaque loup le ressent au plus profond de son cœur, son lieu natal l’appel, inlassablement, un chant qui nous scie le cœur, un doux murmure quand on est proche et un hurlement strident quand on s’en éloigne. Du moins, c’est comme ça que je le vis. Ces arbres gigantesques et inquiétants qui forme le cœur de la forêt soviétique m’en vu naître. Il m’ont vu vivre. Ils me verront mourir. C’est l’un de mes souhaits les plus chers. J’entends une brindille qui craque. Je me glisse furtivement dans mes sœurs les ombres, me mêlant à elles si bien que j’en deviens quasiment invisible, aucun bruit ne me trahissant. J’attends alors. Une longue attente, où aucun bruit ne résonne. Mon odeur pourrait me trahir. Je le sais pertinemment. Mais ais-je réellement une odeur ? Elle n’est qu’un mélange des odeurs de la forêt, un parfum léger mais inquiétant, quelque chose qui inspire la crainte autant que la confiance, un endroit familier tout en étant inconnu. Oui, voilà, une fragrance tout à fait unique tout en ne l’étant pas, que l’on connaît déjà sans jamais l’avoir senti. Rien ne bouge autour de moi. J’hume l’air silencieusement. Rien. Aucune odeur qui me parait inconnu. Mais, par mesure de sécurité, je reste hors du chemin dessiné par la meute régissant tout dans cette forêt. Mes yeux d’argent observent encore un instant autour de moi. Et je reprends mon errance. Enfin, errance. Un court voyage pour me mener à un autre endroit de la forêt que le clan évite généralement. Non pas par crainte –ou peut être, si... – mais surtout car il est éloigné des terres sans hommes et car il est très difficile d’accès. Un refuge parfait pour moi qui ne crains ni les hommes ni la difficulté. Combien de fois ma petite silhouette souple et svelte m’a permis de me glisser dans des endroits inaccessibles pour les autres ? De nombreuses fois...

L’obscurité est à son maximum. Même les rayons lunaires ont dû mal à traverser l’épais feuillage des arbres autour de moi. Diverses espèces autour de moi, d’ailleurs, des épicéas, des pins, des chênes et d’autres dont je ne saurais dire le nom. Ma respiration se fait légèrement plus rapide, car il y a longtemps que je trottine. Mes pattes se posent toujours avec autant de délicatesse et de silence sur le sol, cependant. Et je me glisse avec furtivité hors des chemins de terre battue, traçant ma propre route, autant au sens figuré qu’au sens propre. A nouveau un bruit. Plus loin. Le vent me charrie une odeur. Les arbres commencent à murmurer des mots dans leur langage qui m’est inconnus, mais je comprends une menace silencieuse qui ne m’est pas destiné. Quelqu’un d’autres est là. Je m’arrête, me joignant aux ombres avec rapidité et silence, et rien ne pourrait me trahir. Là où je me suis mis, l’odeur de sève d’un pin couvre ma propre odeur. Je calme mon cœur. Mes yeux observent. Rien ne m’échappe. Pas même le déplacement de ce insecte, là, parmi les feuilles. Je ne pourrais dire de quoi il s’agit, mais je perçois son déplacement. Et je perçois également le déplacement de l’inconnu, une carte précise de la forêt imprimée dans la tête, et le museau comme gps. Une odeur, un regard, peuvent en dire plus long que de simples mots. Et je sais que j’ai intérêt à rester caché, et à observer. Peut être pourrais-je jouer ? Oui... Le terrain joue en ma faveur. Je reconnais déjà mon environnement, pour l’avoir sillonné en tout sens car non loin de me refuge caché. Je jauge les possibilités. Il serait plus intéressant d’attirer l’intrus plus loin, au risque qu’il ne découvre l’endroit où je me réfugie pour échapper aux regards des autres. Ensuite seulement, s’il n’est pas du clan des Bois Hantés je jouerais. Mais pour l’instant il est intéressant, voir même impératif d’éloigner l’intrus, l’inconnu de chez moi. Je n’utiliserais pas la force, car je perdrais à coup sûr, mais la ruse et soit la peur ou soit la curiosité. Car quel loup arriverait à lutter contre son instinct de pourchasser une proie fuyante ? Et quelle âme quelque peu saine ne fuirait pas un endroit effrayant ? Oui, je dois voir l’intru avant de choisir entre la peur et la curiosité, pour être sur de ne pas me louper...